Historique et situation :
” De Marie Curie à Steven Spielberg “

Angel Osorio
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LIMSI – CNRS
91403 ORSAY Cédex BP 133
E-mail : osorio@limsi.fr

Depuis l’apparition de l’informatique la structure électronique, connue sous le nom d’ordinateur, est considérée sous deux angles fonctionnellement différents :

  • une machine à calculer, comme celle inventée par Pascal mais à fonctionnement électrique,
  • un système électronique capable de gérer une mémoire dans le sens le plus large du terme.

Gérer une mémoire signifie bien entendu effectuer des opérations entre ses cellules mais, surtout, lui fournir des informations par divers canaux et les restituer après avoir effectué des traitements sophistiqués. Les toutes premières machines disposaient d’un clavier de machine à écrire comme source d’entrée d’informations et des unités d’impression comme unité de sortie d’informations.

Très vite le monde du graphisme s’est intéressé aux potentialités de l’outil informatique. Les entrées d’informations se sont enrichies d’unités de toutes sortes (tablettes, stylos actifs, souris etc…); les sorties de calculs se sont orientées de plus en plus vers des écrans de visualisation au détriment de l’impression papier. Le concept de poste de travail interactif était né.

Vers la fin des années 50, les premiers essais de traitement d’images ont été mis au point afin d’essayer qu’un ordinateur puisse arriver à traiter, voire à comprendre, les informations fournies par un capteur visuel. Ces développements ont été menés en parallèle avec la saisie de signaux sonores. Depuis cette date les recherches en traitement d’images n’ont cessé d’avancer, les problèmes posés étant de plus en plus complexes et de plus en plus ambitieux. Toute la problématique spatiale par exemple, à contribuée à l’essor du traitement d’image.

Vers le milieu des années 1990, un nouveau défi a été lancé au monde de l’informatique : avec l’apparition et la rapide mise à disposition des utilisateurs de CT-scanners hélicoïdaux, le monde du traitement d’images disposait pour la première fois dans son histoire d’une véritable source d’informations tridimensionnelles, chaque ” image ” étant définie par un ensemble de niveaux définis selon les trois coordonnés spatiales. Un nouveau chapitre s’ouvre dans le domaine de l’informatique : la représentation des données est radicalement différente; les outils mathématiques ne sont pas adaptés au traitement de ce type de données, la manipulation même de données tridimensionnelles constitue une difficulté opérationnelle nouvelle.

Parallèlement l’informatique a connu une évolution dont la rapidité est probablement sans précédent dans l’histoire de la technologie. Quelques chiffres afin d’illustrer la situation en 1999 :

  • en 1975, 16 Ko de mémoire coûtait 600.000 F ; en 1999, 128 Mo de mémoire coûtent 1.900 F. Cela représente un facteur de 2.678.571 fois, c’est à dire que le prix de la mémoire a été divisé par presque trois millions !
  • en 1975, un disque fixe de 2,5 Mo coûtait 400.000 F auprès du même constructeur, (le seul à l’époque ou presque…) ; aujourd’hui un disque fixe de 11 Go coûte aux environs de 2000 F. Le rapport du prix est de presque 900.000 fois !

L’évolution de ces dernières années a conduit à une diffusion généralisée des ordinateurs vers le grand public. La conséquence a été l’essor de progrès considérables dans la vitesse des processeurs de toute nature, rendus possibles grâce aux avancées de l’électronique. Un point tout particulier est celui des cartes dites ” vidéo ” c’est à dire des unités complexes responsables des visualisations sur écran. Très vite on s’est rendu compte qu’il était absurde d’utiliser le processeur central pour effectuer les calculs nécessaires aux visualisations. L’idée était née de décentraliser la partie graphique des ordinateurs vers des processeurs spécialisés disposant de mémoires et de bus propres. La diffusion grand public des machines a fait que ces ” cartes ” atteignent des prix incroyablement faibles pour des performances qui étaient considérées comme impossibles il y a moins de 5 ans : aujourd’hui pour moins de 2.000 F, on peut disposer d’une carte capable de restituer presque deux millions de triangles par seconde.

Ce parcours fait qu’aujourd’hui on peut envisager la mise en commun de connaissances issues de plusieurs disciplines pour des objectifs qui semblaient impossibles hier comme le post-traitement d’images tridimensionnelles. Force est de constater qu’auparavant beaucoup de radiologistes dans le monde regardaient des images de la même manière que Marie Curie en 1917 quand, avec ses voiturettes, elle diagnostiquait des blessures osseuses.

En 1993 Steven Spielberg déclenchait l’étonnement de la communauté scientifique en faisant courir des dinosaures de synthèse dans un environnement naturel avec des personnages bien réels. De plus, tout ce monde ” communiquait ” de manière réaliste. Aujourd’hui, il semble possible d’assurer dans des conditions proches du temps réel, le savoir-faire mis en évidence dans ce film bien connu, pour le traitement des images médicales. Cela constituera un bénéfice majeur pour les patients et les praticiens.